2073. J’ai 80 ans. Et depuis plusieurs dizaines d’années déjà, le monde expérimente l’une de ses plus importantes crises : la surpopulation. Il faut repenser la gestion de l’alimentation, de l’eau et de l’espace pour éviter ou, au pire, retarder l’extinction.

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Le Docteur Nicolette Cayman, appuyée par le Bureau d’Allocation des Naissances, propose de remettre au goût du jour la politique de l’enfant unique. Ainsi, seul le premier-né de chaque fratrie gagnera le droit de vivre. Les autres seront listés et emmenés à la cryo-bank, dans l’attente de jours meilleurs. Les autorités assurent qu’ils ne souffrent pas, et qu’ils sont simplement mis en sommeil. Pour une durée improbable. C’est vrai.
Un homme, Terrence Settman, a pourtant décidé qu’il ne se plierait pas au plan des autorités. Face à la naissance de ses sept petites filles, il met en place un plan minutieux pour garantir leur survie. Pour commencer, chacune portera le nom d’un jour de la semaine. Celui où elle pourra sortir.
Son appartement sera quant à lui repensé pour qu’elles puissent y vivre et, éventuellement, s’y cacher. Rien ni personne ne pourra découvrir leur existence. Car à l’extérieur, les sept sœurs ne sont plus qu’une seule personne : Karen Settman. Mais si ce plan a tenu jusqu’à maintenant , la disparition de Lundi risque bien de le fragiliser.
Un futur pas si lointain
De science-fiction à anticipation il n’y a qu’un pas. Ici, pas de délires virtuels mais une technologie somme toute crédible, si on considère les progrès obtenues ces dernières dizaines d’années. Quant à l’esthétique des personnages, elle est digne de celles que l’on peut repérer dans les rues aujourd’hui : des vêtements contemporains et des coiffures basiques. Le tout dans un environnement que l’on pourrait presque reconnaître. Ainsi, les sœurs vivent à une époque qui n’est pas loin de la nôtre. Et ça pousse à réfléchir.
Comme dit au début, dans ce futur hypothétique, j’ai 80 ans. Ce qui reste, et ne ruinez pas mes espoirs, une performance faisable. L’ancrage temporel participe ainsi à créer une impression de proximité et, au vu du contexte, d’anxiété. Je me suis trouvé prise dans le scénario avec une idée fixe : en 2073, je serai peut-être encore en vie, mais pour voir quoi ?
Si ce film a bien quelque chose digne de la science-fiction, il se trouve dans la technologie. Qui, d’ailleurs, n’a rien de libératrice. Ainsi, via un bracelet individuel qui résume la vie des individus, chacun est identifié comme « enfant unique » ou, éventuellement, comme sujet à surveiller. C’est grâce à ce bracelet que les habitants peuvent aller et venir, à travers des points de contrôles. Une technologie, qui complète le bracelet, est aussi implantée dans les mains, les transformant en contrôleur.
« Il ne faut pas que ça s’ébruite »

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Regardez la bande-annonce. Vous trouverez ce dialogue à l’intérieur. Donc ça ne compte pas comme un spoiler. Juste comme une incohérence agaçante. Si j’ai accroché au scénario, c’est notamment parce qu’il s’appuie sur des émotions et une certaine tension. Et puis, voilà que débarquent des molosses.
Parce que, rester discret, pourquoi pas. Personnellement, ça me va. Ça pourrait même rajouter du suspense à un film qui est déjà bien fait. Mais alors, j’aurais une question : pourquoi sortir les armes lourdes aussi vite ? Par esprit de contradiction ?
A mon sens, les scènes de combat, d’explosion ou de fusillades n’avaient pas toute leur place. Surtout quand on tient à garder des opérations sous contrôle… Elles ne semblent ainsi pas rentrer pas dans la trame de l’histoire et donnent l’impression d’avoir été posées là parce qu’il faut que ça tape et que ça explose pour faire marcher un film au box-office.
Alors, que ça tape, admettons. Mais globalement, ça manque de finesse. Ça part beaucoup trop vite en hors-piste. J’en veux pour preuve le débarquement des molosses du Bureau dans l’immeuble des sœurs. C’est amené avec les pieds, comme une bonne partie des passages violents du film. Quand ceux n’apparaissent pas comme gratuits..
Mesdemoiselles Settman
Ma culture cinématographique étant ce qu’elle est, je n’avais encore jamais vu de film avec Noomi Rapace. La honte, je sais. Toutefois, même pour moi, une actrice qui incarnent sept personnages différents, c’est un pari osé. Mais le défi est relevé, avec brio. Parce ce que non content de les incarner, elle leur apporte à chacune le supplément qui les différencie et les rend unique.
Par la gestuelle et l’élocution, elle réussit à donner à chacune des sœurs une personnalité et une identité distincte. Chacune a ses mouvements plus ou moins gauches ou empruntés, ses intonations et ses tics. Et, surtout, ses propres passions. D’ailleur même sous les traits de Karen Settman, elles apportent chacune une touche à cette identité commune. Qui pourrait participer à les vendre, à bien y regarder.
Quant à Willem Dafoe, il porte avec beaucoup d’élégance le rôle du grand-père protecteur et méticuleux. Il y a, dans sa voix et dans son jeu, quelque chose d’extrêmement respectable. Une présence particulièrement forte, qui le met en position de mentor. Mais, malheureusement pour moi, l’ombre de Ryuk plane encore. 😉
Seven Sisters (titre original : What happened to Monday ?)
Un film de Tommy Wirkola
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En salle depuis le 30 août.
En-tête : © SND.