La Vie troublée d’un tailleur pour dames, Bulbul Sharma
Vous ai-je déjà dit qu’il faut toujours se méfier des quatrièmes de couverture ? Oui ? Eh bien Je vais le répéter tout de même. On ne se méfie jamais assez d’une quatrième de couverture. Celle de ce roman est d’ailleurs à l’origine d’un énorme malentendu.
En effet, dans cette quatrième de couverture traitre, il est fait mention d’un meurtre que le héros du roman devra résoudre. Je pensais donc avoir affaire à un polar. J’ai entamé ma lecture avec enthousiasme, mais j’ai vite trouvé que le cadavre se faisait attendre. Au bout de plusieurs chapitres, les personnages affichaient encore une bonne santé insolente et toujours pas le moindre petit macchabée à se mettre sous la dent. Il m’a fallu attendre le dixième chapitre (rien que ça), pour qu’enfin quelqu’un se décide à passer l’arme à gauche.
Mais alors de quoi pouvait donc bien parler ce livre (qui est autant un polar que je suis contorsionniste) pendant tout ce temps ? De son véritable sujet : les mésaventures de la vie quotidienne du seul tailleur pour dames dans un petit village en Inde. Si cet aspect avait été plus mis en valeur, j’aurais davantage profité de ma lecture au lieu de guetter l’arrivée d’un éventuel défunt. Car ce livre est avant tout une comédie de mœurs.
Nous suivons le quotidien de Janak, un jeune homme doux et timide, tailleurs pour dames dans le petit village de Giripul. Son quotidien est rythmé par les demandes des clientes et les sautes d’humeurs imprévisibles de son irascible épouse. Assis derrière sa machine à coudre, il est le témoin privilégié de la vie quotidienne de son village, entre querelles de voisinage et petites cachotteries, et de l’évolution de son village plutôt traditionnel vers la modernité. Il y a là une matière suffisamment riche, pas besoin de nous faire saliver avec un meurtre qui au fond n’agite le roman que le temps d’une poignée de chapitres.
Janak est extrêmement attachant. J’ai tout de suite accroché face à ce rêveur un peu timide et effacé. J’ai aimé suivre avec lui les petites péripéties qui rythment la vie de son village. J’ai tremblé devant sa terrible belle-mère et son perroquet caractériel. J’ai partagé ses craintes quant à son rêve prémonitoire mettant en scène la troisième épouse du maire assassinant son mari volage. Le style est agréable et m’a donné envie de faire plus ample connaissance avec l’auteur au travers d’autres ouvrages. Qui, je l’espère, ne seront pas dotés de quatrième de couverture mensongère !
Sur ce, je vous salue et vous souhaite une bonne lecture,
Miss Jack